Quel(s) type(s) d’innovations sociales pour une justice sociale et environnementale ?

Colloque scientifique (activité #434)
dans le cadre du 89è Congrès annuel de l’Association francophone pour le savoir (Acfas) :

Quel(s) type(s) d’innovations sociales pour une justice sociale et environnementale ?
 

Ce colloque (#434) est organisé par le Centre de recherche sur les innovations sociales (CRISES) et ses partenaires, le Territoires innovants en économie sociale et solidaire – TIESS, la Chaire de recherche en innovation sociale et développement des territoires, la Chaire Alban D’Amours en sociologie de la coopération et la Chaire sur l’engagement social, dans le cadre du Congrès de l’Acfas, les lundi 9 et mardi 10 mai 2022 à l’Université Laval (en ligne).

La programmation complète est disponible ici !

? Conférence d’ouverture : « Innovation et changement de civilisation »

Présentée par Dominique BOURG, philosophe, est professeur honoraire de l’Université de Lausanne. Il est directeur de la rédaction de la revue La Pensée écologique. Il co-dirige la collection « L’écologie en questions » et la collection « Nouvelles Terres » aux Presses universitaires de France (PUF). Il dirige également la série des PUF sur les Grands textes de l’environnement et préside le Conseil scientifique de la Fondation Zoein (Genève).

Résumé : Je partirai de l’idée que la civilisation mécaniste moderne née à la fin du 16e et au début du 17e, et dont les conséquences ultimes se sont développées dans la seconde moitié du 20e siècle, est finissante. Je rappellerai le type d’innovation caractéristique qu’elle a pu susciter, à savoir inséparable de la logique moderne d’arrachement à la nature, et qui nous a conduits à une impasse tant écologique qu’en matière de sens. Je pointerai ensuite les composantes de la civilisation émergente déjà présentes et m’interrogerai sur le type d’innovation dont elles devraient être porteuses.

? Conférence de clôture : « Innovation sociale et modèle québécois : continuité et rupture ? »

Présentée par Marie J. Bouchard, professeure au Département d’organisation et ressources humaines de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et Benoît Lévesque, professeur émérite au Département de sociologie de l’UQAM.

Résumé : Cette communication se fera sous la forme d’un entretien entre Marie J. Bouchard et Benoît Lévesque. Nous proposons deux séries de commentaires qui prennent en considération le repositionnement du CRISES amorcé avec le renouvellement de la subvention comme regroupement stratégique. Une première partie de l’intervention portera sur les phases antérieures des travaux du CRISES (avec le biais de recherches de B. Lévesque) et ce qu’ils révèlent pour répondre aux défis de la période qui s’amorce avec les années 2000 (Rétrospective). La seconde partie portera sur les défis que représente le repositionnement du CRISES en termes de diagnostic cadré par la transition sociale et écologique (Prospective). La nouvelle conjoncture se présente comme une crise sans précédent du modèle de développement, posant des défis plus lourds à relever que ceux des générations précédentes, menant à la nécessaire refondation et revalidation conceptuelle et méthodologique de la transformation (nouvelle conception de l’économie, du social et de l’environnement ; nouveaux acteurs, nouveaux terrains) et de sa matérialisation dans les innovations sociales.

? Des tables rondes : 

  • L’intervention auprès des personnes aînées entre enjeux politiques, territoriaux et de justice sociale
  • Qualifier, classer et évaluer les innovations sociales : enjeux scientifiques et politiques
  • Que sont devenues les innovations sociales ?

Et plus de 25 communications orales disponibles qui visent à proposer une réflexion commune sur les défis entourant l’analyse et la portée des divers types d’innovations sociales !

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? Problématique du colloque : 

Force est de constater depuis quelques années l’omniprésence des innovations sociales (IS), tant dans les pratiques sociales et les politiques publiques que dans la littérature scientifique et les programmes de recherche des universités. En se diffusant de la sorte sur une grande échelle au cours des années récentes, les IS ont-elles été « resignifiées » pour en atténuer, voire en extirper, leurs dimensions critiques et leur potentiel de transformation sociale ? En conséquence de cette évolution, ont-elles été simplement réduites à des dispositifs d’accompagnement des innovations technologiques et à des mesures palliatives pour combler les failles du marché et les insuffisances des interventions étatiques ? En accord avec ces fonctions, les IS incarneraient des solutions inédites qui, grâce à une approche supposément consensuelle et inclusive, comporteraient des bénéfices supérieurs aux solutions existantes tant pour ses promoteurs que pour la société dans son ensemble. Les IS seraient-elles ainsi devenues une panacée et un « concept magique » ? Certes dominante et portée par une vision fonctionnaliste et technocentriste, cette conception des IS n’épuise toutefois pas toute leur signification. En effet, loin de constituer un phénomène uniforme, associé à une conception unique, les IS représentent un phénomène pluriel, se composant de plusieurs types, articulés à autant de conceptions différentes et reliés à des contextes spécifiques.

Parallèlement au rétrécissement de la signification des IS, on assiste à la montée des inégalités, tandis que les enjeux identitaires s’exacerbent et que les crises sanitaires et climatiques s’intensifient. Ce contexte serait-il propice à l’émergence et à la consolidation d’un autre type d’IS, axé sur la justice sociale et environnementale ? Selon les théories critiques se réclamant de cette dernière, les groupes dominés sont victimes d’une distribution inique, d’un déni de reconnaissance et d’un déficit de représentation, alors même qu’ils sont davantage affectés par la crise sanitaire et les changements climatiques. Portées par une action collective et par des mouvements sociaux, représentant les groupes dominés, les IS émergeraient alors en réaction aux injustices, qu’elles se proposeraient de faire reculer.

Il importe de construire une typologie pour mieux comprendre ce phénomène pluriel et polysémique que sont les IS. La construction d’une typologie permet de dépasser les approches et les définitions convenues qui réduisent les IS à un seul type universel, laissant ainsi dans l’ombre d’autres approches plus critiques et d’autres phénomènes plus conflictuels. Elle rend possible une meilleure analyse des conditions d’émergence, du processus, des trajectoires et des facteurs de diffusion et de pérennité, qui varient suivant les types d’IS. Distingué en divers types, le vocable IS devient dès lors un concept fondamental pour aborder la dynamique des changements sociaux, particulièrement ceux qui s’alimentent à l’action sociale, que ce soit celle des individus, des entrepreneurs sociaux, des gestionnaires ou des groupes et des mouvements sociaux.

La proposition d’une typologie transversale aux typologies habituelles, qui distinguent les IS selon les domaines (économie sociale et organisations collectives, territoires et instances de concertation, pratiques et politiques sociales, de même que travail et emploi), favorise le croisement des regards entre spécialistes des IS. Dépassant les effets contextuels et ceux associés aux domaines, elle met l’accent sur les enjeux sociaux contemporains (identité et reconnaissance, distribution des richesses, ainsi que démocratie et participation) qui traversent tous les domaines d’IS. Elle permet enfin de mieux préciser la portée macro sociale des IS : reproduction ou transformation sociale, selon qu’elles soient réparatrices ou transformatrices.

La construction d’une telle typologie est un exercice scientifique qui a des répercussions économiques et politiques. En effet, l’enjeu de la définition de ce qu’est une innovation sociale, « vraiment innovante » ou « vraiment sociale », n’est pas seulement un exercice académique. Le regard porté sur les innovations sociales, de leur reconnaissance à l’évaluation de leurs répercussions, conditionne aujourd’hui l’accès à des ressources notamment par des pouvoirs publics, des acteurs de la finance sociale et des bailleurs de fonds philanthropiques. D’ailleurs, des efforts de légitimation sont consacrés par les acteurs de l’innovation sociale et leurs partenaires, pour produire de nouveaux labels distinctifs (« innovation sociétale », « innovations sociales émancipatrices » et « innovation durable », entre autres).

À l’intersection d’enjeux scientifiques et politiques, notre colloque vise à proposer une réflexion commune sur ces défis entourant l’analyse des types d’IS. Les deux types d’IS, rapidement esquissés dans les deux premiers paragraphes, représentent-ils les figures opposées d’une typologie qui pourrait comporter d’autres types ? Selon quels axes distinctifs construire cette typologie ? Typologie des approches et typologie du phénomène ? Typologies d’effets ou de processus ? Quels acteurs sont aujourd’hui promoteurs de tel ou tel type d’innovations sociales ? Le contexte de crise actuel est-il propice à l’émergence d’un nouveau type d’innovations sociales ? Quel(s) type(s) d’innovations sociales comporte(nt) un réel potentiel transformateur pour une justice sociale et environnementale ? Le changement d’échelle des innovations sociales peut-il entraîner une meilleure justice sociale et environnementale ? Si oui, à quelles conditions ? Quelles articulations possibles entre innovations sociales et innovations technologiques ? Comment mesurer la contribution des divers types d’IS tant au regard de la justice sociale et environnementale qu’à celui de la satisfaction des besoins et des aspirations des groupes dominés ? Bien que transversales, ces questions peuvent certes être abordées à partir des résultats empiriques et des réflexions théoriques qui, dans la recherche et la pratique sociale, sont le plus souvent associés à des objets concrets appartenant plus spécifiquement aux domaines et aux axes de recherche du CRISES.

Ce colloque poursuit les objectifs suivants : 1) amener les chercheurs-euses et les acteurs sociaux concernés à partager leurs connaissances et à s’enrichir mutuellement; 2) faire le point sur les connaissances, les cadres théoriques et les approches méthodologiques associés aux divers types d’IS; 3) illustrer par des études de cas, des résultats de recherche et des savoirs expérientiels, en provenance des praticiens-nes et des représentants-es des mouvements sociaux, les forces et les faiblesses de chacun des types d’IS et 4) dégager des idées nouvelles et des pistes de collaboration pour l’avancement des connaissances.

Dans le cadre du 89è Congrès de l’Acfas, dont la thématique est « Sciences, innovations et sociétés », se pencher sur les IS est d’une grande pertinence sociale et scientifique. Les innovations sociales contribuent de manière importante à la satisfaction de besoins et d’aspirations non comblés. Elles se distinguent nettement des innovations technologiques, par leur processus et leur visée. Mais, en ces temps de pandémie et de crise climatique, c’est l’articulation d’innovations sociales et technologiques œuvrant à une plus grande justice sociale et environnementale qui est requise, afin de faire face collectivement aux défis sociétaux.

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? Organisateurs :

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