Procès d'institutionnalisation de l'économie sociale au Québec
Collection
Études théoriques et méthodologiques
Année
2000
Numéro
ET0003
Auteur
Édition
Centre de recherche sur les innovations sociales
Résumé
Ce n’est certes pas la première fois qu’on assiste à une forme d’institutionnalisation des composantes de l’économie sociale au Québec mais la période actuelle revêt une importance toute particulière, notamment parce que l’ensemble du secteur est en voie d’être institutionnalisé et que l’économie sociale se retrouve maintenant non plus à la marge mais au centre des débats sur un nouveau modèle de développement en émergence. Le présent cahier de recherche vise à donner un éclairage sur cette phase récente d’institutionnalisation (1995-1999). Il se divise en quatre parties. La première situe le moment actuel dans l’histoire de l’économie sociale depuis ses origines européennes et identifie les grandes étapes de son développement au Québec. La seconde est consacrée à l’évolution de la définition de l’économie sociale, depuis la définition féministe des infrastructures sociales jusqu’à la définition gouvernementale qui assimile l’économie sociale à l’entrepreneurship collectif. La troisième étudie une partie du cadre législatif et réglementaire qui balise le développement de l’économie sociale depuis 1996, notamment la nouvelle Loi sur les coopératives, la Politique de soutien au développement local et régional et le processus devant mener à l’adoption d’une Politique de soutien à l’action communautaire autonome. La quatrième et dernière partie questionne les potentialités et les limites d’une institutionnalisation de l’économie sociale conçue principalement comme composante d’une politique d’emploi au plan local. Au terme de cette analyse, nous concluons que quatre ans après la Marche des femmes qui réclamait des infrastructures sociales, la définition de l’économie sociale demeure large mais son opérationnalisation est restrictive et différenciée selon les différents segments (coopératives, OBNL marchands et OBNL non marchands) et selon les sous-secteurs (santé et services sociaux, éducation populaire, etc.). Ce faisant, l’action gouvernementale renforce le clivage entre une économie sociale non-marchande (tenue à une complémentarité de services), une économie sociale marchande (entreprises créatrices d’emplois au plan local) et une économie sociale concurrentielle (capable de compétitionner sur les marchés mondiaux. Par ailleurs, pour le moment, le développement de l’économie sociale au plan local demeure dans le paradigme de l’emploi, avec le maintien de la norme du rapport salarial (salaire, durée indéterminée, horaire temps plein, etc.), mais on peut craindre qu’il s’agisse d’un marché du travail « secondarisé », dans une logique duale de développement de l’emploi au Québec.